Le véritable Saint-Genest, Rotrou

Publié le par Alix



Rotrou (1609-1650): dramaturge, délaissé au profit de Corneille, Racine et Molière. Il se démarque par une conception classique, avec un mélange des genres littéraires; ex: tragi-comédie.
Auteur de la troupe de l'Hôtel de Bourgogne, il deviendra protégé de Richelieu en 1634.

Le véritable Saint-Genest (1646) [ici édition GF-flammarion] est une tragédie sur la chrétienté et le martyre, inspirée de Polyeucte de Corneille.
L'action se déroule en Asie Mineure sous le règne de l'empereur Diocletien. Les persécutions contre chrétiens sont encouragées.
Genest est un comédien de grande renommée. Son rôle va entraîner sa conversion.

=mise en abîme car théâtre dans le théâtre + illusion de la pièce devient réalité.

dimension apologétique-> défense du théâtre et de la religion chrétienne

situation: Adrien est un ministre de Maximin, conduit au supplice pour s'être converti.
Genest->joue Adrien
Marcelle->Nathalie (femme d' Adrien)
Octave-> Maximin [à la fois dans le public et sur scène= originalité]
Sergest-> Flavie

Notes sur des passages-clés de l'oeuvre:


Acte I, scène 5
illustration de la tradition chrétienne: le programme du mariage de Valérie et Maximin est présenté.
En quoi la dimension apologétique s'illustre-t-elle pleinement ici?
plan possible:
1-le rôle de Genest
2-mise en valeur du genre théâtram
3-enjeux du débat Anciens/modernes

->contexte particulier car critique du théâtre par l'Eglise= mise en valeur du statut de comédien + l'empereur lui-même vient consulter Genest (caractère modeste): il est respecté, et mène le dialogue.
->jeu sur les interrogations de l'empereur: il doit se répéter pour être entendu, et alternance de questions directes et indirectes.
=>place le théâtre comme un noble plaisir ->ce que désire Dioclétien (présence d'hyperboles et métaphores)
+ intervention de Valérie: sublime le métier de comédien.

Vante l'art de feindre: théâtre comique
+ rappel aux sources antiques dont s'inspire Rotrou
->Dioclétien privilégie la surprise (= sensibilité baroque)

cf Corneille/ Sénèque =débat Anciens/Modernes suggéré ici.

Acte II, scène 4:
Dans la pièce cadre: répétition, entretien avec décorateur (= omniprésence du théâtre).
Sentiments d'Adrien de - en - étrangers à Genest: scène et rôle décisifs ici. 
+ évolution psychologique du héros.

I-vers 391 à 400: répétition
II- vers 401 à 420: emportement dû au rôle+ sentiments chrétiens: agitation et doute
III- vers 421 à fin de la scène: intervention divine

I-reprise de l'extrait travaillé par Genest à l'acte II scène 7: interprétation d'un rôle; démarche de mémorisation= indices concrets sur métier de comédien.
->passé de persécuteur abordé, référence au supplice+ paradoxe dans la réjouissance du martyr (ils vont rejoindre Dieu/ supplice) + peur des bourreaux: ils craignent pour eux-mêmes.

II-bascule dans la réalité: Genest parle en son nom, exprime ses propres pensées. Parle des dieux au pluriel= religion païenne+ tente de lutter contre sa conversion. Crise d'identité, perd le véritable Genest->en phase d'évoluer (= rapport au titre).
+se base sur sa raison et son expérience pour essayer d'expliquer ce qui lui arrive. Démarche inutile, continue de douter. 
Emploi de "Christ" marque sa conversion->discrédit des dieux païens avec champ lexical du rejet et du mépris.
Ambiguïté du terme "crucifié": intensifie le Christ/ le rabaisse= dualité des religions.

III-Confusion sûre, mais esprit de Dieu comme figure rassurante-> "merveille"= réalité du miracle qui ravive la foi/ fin des réticences 
opposé à l'emploi de "mais". 
->certaine passivité de Genest, se laisse balloter par les deux, avec description de l'alternance de ses états d'âme.

Acte IV, scène 7: extrait v1324 à v1372
 mise en abîme+ fin de la fiction
-métaphore filée: orage, écueil, port <-topos d'un bâteau en pleine mer
+héros du Sublime= ambiguïté disparaît

En quoi la fin du rôle de Genest est-elle marquée?

I)v 1324 à 1330->le véritable Genest (rappel au titre)
-passage du faux au vrai+ évolution de Genest par l'intervention divine (champ lexical de la religion), nécessiter de lever les masques indiquée par le héros ("c'est Genest qui s'exprime..")
-> changement d'identité
apologie du théâtre.
->notion de devoir: il n'est pas actif, mais dominé par une force extérieure

II)v1331 à 1342->adresse aux Romains
-Annonce de la nouvelle+ Genest se met en scène lui-même
-antithèse et force des termes employés
-bonheur passé, révolu + autocondamnation (car a participé aux persécutions)
-theatrum mundi= théâtre de la vie.
-présent de vérité générale= Genest moraliste
=le doute sur son identité disparaît petit à petit

III) v1343 à 1372->étapes de sa conversion
-métaphore de son destin s'il continue les persécution: "orage" (v1349)
-gradation dans la conversion, mais valide son choix
=>désir de se mêler aux Chrétiens (notion de partage+ choix des articles et déterminants: "ma foi", "leur dieu"), de rejoindre leur groupe (cf le terme "secte" au v1336, qui n'est pas négatif)
Le champ lexical témoigne qu'il est prêt (ex: "vigueur")
->à la fois envoûté ("merveilleux") par la foi et lucide: sorte de venin, il l'accepte tout de même, fait preuve d'une sagesse digne (héros face à la fatalité)
+ se place comme un martyr, le doute subsiste: "si je l'ai" (1371)
-conclusion du passage claire= tragique, sa vie n'est plus entre ses mains.
Il n'est ni comédien, ni persécuteur: c'est St Genest.

Autre plan possible:
I- v1324 à 1334=annonce et touché par la grâce
II- v1335 à 1354: retour sur son passé opposé à sa conversion miraculeuse
III-v1355 à 1372: revendique ouvertement sa foi et prêt à devenir martyr.

Acte V, scène 1: stances de Genest
->spécificité dans la forme strophique = stance: un passage lyrique, chaque strophe a sa propre cohérence et constitue une unité, exprimant des sentiments sincères. C'est un monologue

problématique possible: comment contribuent-elles à embellir le statut de martyr en vue d'une apologie de la religion chrétienne?

I- émerveillement, expression de la reconnaissance de Genest pour le Divin,touché par la grâce de Dieu (avec champ lexical du ciel) + prémisce de sa félicité prochaine, dimension apologétique.
=bonheur paradoxal car va être martyrisé/ souffrance comme acte valeureux

II- nouvelle isotopie, jeu sur calme marin
affronte le destin, calme, utilisation du champ lexical du mal opposé à celui du bonheur.
Thème du theatre du monde: le monde comme illusion, la religion comme unique vérité= païens induisent les Hommes en erreur.
Implore Dieu directement; 

III- Retour à l'image du martyr et à la précarité terrestre
mort salutaire (et champ lexical principal), rappel au baptême, jeu sur la vie: la mort comme un accomplissement de la Foi, libération, voire 2nde naissance.
valeurs morales de Genest mises en avant (il fait preuve de courage)
bonheur opposé à la fatalité (régisseur du monde: Dieu)
naissance et mort étroitement liées

IV- Préparation de la suite:
Acteur résolu+ paradoxe du martyr de par sa vision de la mort
vie chrétienne comme vraie
+ "céleste": réelle symbole divin
martyr comme guerrier, héros, soldat de Dieu
jeu sur la comparaison entre bière et berceau:structure cyclique de la vie (cf St Augustin) topos du memento mori/ carpe diem (vivre au jour le jour+ ne pas oublier que l'on mourra un jour)





 

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